Réveille-toi, Leno, ils sont devenus fous ! (Tierno Monénembo)
Je viens d’avoir Sékou Koundouno du FNDC au téléphone : ce que l’on redoutait depuis quelques heures est arrivé. Ils viennent d’arrêter Foninké Mengué, Djanii Alpha et Billo Bah. Ils ont osé, les salauds ! Mais à quelque chose, malheur est bon, l’acte ignoble qu’ils viennent de commettre montre enfin leur véritable visage. Mamadi Doumbouya et ses acolytes ne peuvent plus nous mentir : leurs têtes de monstres parlent mieux que leurs bouches de bluffeurs.
Je l’ai déjà écrit dans ces colonnes : l’attribution (absolument illégale !) du nom de Sékou Touré à l’aéroport de Conakry, n’a rien d’anodin. Notre lieutenant-colonel a voulu nous adresser un message à peine codé : Je suis le nouveau Sékou Touré et tenez-vous bien, je serai encore cent fois plus sanguinaire que lui.
La messe est dite, Djanii Alpha, Foninké Mengué et Billo Bah ont été interpellés hier en pleine conférence de presse, au vu et au su du monde entier, traités comme des bêtes de somme et conduits vers une destination inconnue. Le point de non-retour a été largement dépassé. Que plus personne ne nous parle de transition. Nous sommes au début de la pire dictature de notre malheureuse histoire.
Et vous savez pourquoi tout ce barda ? Vous savez pourquoi cette monstrueuse démonstration d’absolutisme ? Vous savez pourquoi ces nobles patriotes ont été malmenés de la sorte ? Pour avoir écrit et propagé ces mots simples, ces mots vrais, ces mots de courage et d’indéniable patriotisme : « Bon, j’espère quand-même que dans le fans-club (plus ça dure, plus on s’enrichit) qu’il dirige, des voix vont se lever pour lui rappeler (à Dansa Kourouma) que le CNT n’est pas une association de blakoro qui rêve debout. » Voilà, mes chers compatriotes, le motif pour lequel nos compatriotes ont été jetés en prison et pour lequel ils risquent peut-être l’écartèlement ou la décapitation.
J’invite tous les magistrats du globe à se pencher sur cette innocente déclaration pour me dire s’ils y trouvent un seul indice grave et concordant (j’emploie volontiers le langage châtié des professionnels du droit !) d’infraction ou de crime et délit.
Non, Monsieur Wright, Foninké Mengué n’a pas discrédité la justice guinéenne. Nul ne peut discréditer ce qui n’existe pas. Oui, vous le savez mieux que moi, la justice guinéenne n’a jamais existé. Nos magistrats ne sont pas au service du droit. Ils s’en foutent de la morale et de la loi. Notre justice est une justice aux ordres : rien pour la veuve et l’orphelin, tout pour les sordides caprices du chef !
C’est la énième fois que Foninké Mengué est en prison. Seulement, c’est Alpha Condé qui est parti, le vieux lion du FNDC, lui est toujours là, solide comme un roc, en parfait accord avec les profondes aspirations de son peuple. Mamadi Doumbouya devrait méditer cela si jamais il lui reste une petite goutte de lucidité.
En tout état de cause, cette ignominie ne découragera personne. Les Guinéens en ont vu d’autres. Ils savent qu’ils n’ont pas le choix, qu’ils doivent se battre jusqu’au dernier contre cette clique militaire qui les martyrise, debout comme un seul homme, armés de courage, plus que jamais convaincus que le combat pour la liberté est le plus beau des combats.
La dictature ne passera plus dans ce pays, Lieutenant- Colonel Mamadi Doumbouya ! Tuez-nous tous, si voulez ! Mais rien, je dis bien rien ne nous empêchera de vous cracher les quatre vérités.
Tierno Monénembo, lelynx.net