Candidature Condé et Ouattara : un Guinéen évoque un risque d’instabilité dans la sous-région
Même si Alpha Condé ne s’est pas prononcé officiellement sur sa candidature après sa désignation par la mouvance présidentielle, Alassane Ouattara lui a annoncé officiellement qu’il sera candidat à la présidentielle du 31 octobre.
Selon plusieurs observateurs, ces deux situations constituent une menace pour la paix et la stabilité au niveau de la sous-région Ouest africaine. C’est l’avis d’Alhassane Camara autrement appelé R2R. Dans un entretien qu’il a accordé à notre rédaction ce lundi 10 août, ce jeune diplômé et enseignant de profession interpelle ces deux dirigeants sur ce qui risque d’arriver avec leurs volontés de confiscation du pouvoir.
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Planète7.com: Alassane Ouattara a annoncé officiellement sa candidature à la prochaine présidentielle ivoirienne, alors qu’il avait affiché la volonté de transférer le pouvoir à la nouvelle génération. Quelle analyse faites-vous de cette situation ?
Alhassane Camara : Ce qui se passe en Côte d’Ivoire et en Guinée, ce ne sont que des dérives autoritaires. Des gens qui se croient plus forts que la loi parce qu’ils ont l’armée à leur possession, ils font entorse à la loi à leur bon vouloir. Aucun de ces deux chefs d’État n’avait le droit de se représenter pour un autre mandat. M. Ouattara avait donné l’espoir, et s’il avait respecté la loi dès le départ, il n’avait même pas besoin de dire qu’il va transférer le pouvoir à une nouvelle génération parce c’était pour lui un devoir.
Après la mort d’Amadou Gon Koulibaly, des voix se sont levées au sein de son parti le RHDP pour lui demander de se présenter. Est-ce que vous pensez qu’il a agit sous la pression des responsables de son parti ?
Franchement, si Ouattara avait la réelle volonté de céder le pouvoir, Gon Koulibaly ne devait même pas être investi candidat. Gon Koulibaly était déjà une personne assez fragile à cause de son état de santé. C’est là-bas moi j’ai commencé à douter de Ouattara.
La côte d’Ivoire a plein des jeunes cadres qui peuvent porter le flambeau du pays même à l’international à plus forte raison pour une candidature à une élection présidentielle. Pour l’avenir de la côte d’Ivoire, pour l’avenir de la jeunesse ivoirienne, Ouattara aurait dû choisir une autre personne au sein du RHDP après la mort de Gon Koulibaly.
Y en a qui pensent que cette velléité de confisquer le pouvoir est lié au contexte dans lequel il est arrivé au pouvoir. C’est votre avis ?
Moi je crois que cela ne doit pas lui permettre de confisquer le pouvoir. Bien sûr le pays a un passé douloureux, mais il y a eu une injustice aussi. Parce que si la justice existait, si la justice jouait son rôle, Laurent Gbagbo ne pouvait pas se retrouver en prison et que Ouattara soit libre de ses mouvements et continue d’exercer son pouvoir. Si ces crimes lui poussent à la confiscation du pouvoir, pour moi c’est une erreur.
Quelles conséquences peuvent avoir les situations de ces deux pays au niveau de la sous-région ?
Alpha Condé et M. Ouattara sont en train de créer une instabilité totale dans la sous-région. Donc la conséquence directe c’est l’instabilité politique, l’instabilité économique et le retard du continent et de ces deux pays. Parce que quand il y aura une instabilité, le peu qu’ils ont construit, nous allons perdre tout ça. Et aucun investisseur ne viendra investir son argent dans un pays où la loi n’est pas respectée, dans un pays où il y a une instabilité. Ils ne sont pas Dieu pour prévoir l’avenir de leurs pays.
Revenons sur le cas guinéen. Alpha Condé a été investi candidat par la mouvance présidentielle à l’issue de la convention nationale du parti. Est-ce que vous pensez qu’il est déjà candidat ? Il a répondu à la demande ?
Vu tout ce qui se passe aujourd’hui, Alpha Condé a déjà levé l’équivoque sur sa candidature du moment où il avait annoncé à la presse sénégalaise que s’il y a une nouvelle constitution, naturellement il y a un troisième mandat. Et au moment où il a changé la constitution il ne devrait pas modifier l’article sur la durée et le nombre du mandat en Guinée s’il n’avait pas la volonté de briguer un troisième mandat.
Dernière question, imaginons si aujourd’hui vous avez la chance de faire face à Alpha Condé, quel conseil vous le donneriez ?
D’abord, je vais lui parler en tant que père et fils. Je lui rappellerai les valeurs qu’il doit incarner. Je lui rappellerai qu’il a été l’un des nos idoles dans la classe politique guinéenne, qu’il a été une référence pour la jeunesse guinéenne. Je lui dirai que quand il a été élu en 2010, même le Fouta que Damaro considère comme le fief de la rébellion avait l’espoir en lui. Mais c’est quand il s’est entouré des anciens du PUP que lui-même il a combattu à peu près de 40 ans, que le désespoir a commencé à se sentir. Et jusqu’aujourd’hui ça continue. Nous, nous voulons qu’il cède le pouvoir. Il a un bilan et il a des projets pour notre pays. Mais cela ne lui donne pas non plus le droit de s’octroyer une présidence à vie.
Entretien réalisé par ADD