J’ai ressenti avec beaucoup d’amertume et d’angoisse le frisson de peur et les signes d’anxiété sur les visages de nos chers enfants dans les salles de l’examen d’entrée en 7ème année qui a pris fin ce vendredi en Guinée.
J’ai été très paumé et très malheureux de constater que notre cher pays continue de s’accrocher mordicus à un système éducatif non seulement dépassé et inefficace, mais aussi rétrograde et totalement dénué de pertinence.
Si l’examen de fin d’année était vu dans un passé lointain comme le seul moyen d’apprécier le niveau des élèves et de déterminer leur éligibilité à obtenir un diplôme, force est de reconnaître que le monde développé et émergent d’aujourd’hui s’est complètement débarrassé de ce système d’évaluation, manifestement inefficace et incohérent.
Le système d’évaluation dans ce monde debout et responsable repose désormais sur les évaluations mensuelles en lieu et place des examens finaux.
Les examens finaux en question eux-mêmes, font partie intégrante de ces évaluations mensuelles. Du coup, les examens finaux ont le même poids que les évaluations mensuelles.
Ce qui prouve que la réussite d’un élève ne dépend plus uniquement de ses notes obtenues à l’issue des examens finaux, mais de celles qu’il a obtenues durant les différentes évaluations mensuelles.
Autrement dit, les examens finaux ne sont plus les moyens incontournables qui déterminent la réussite ou l’échec d’un élève.
Mieux, les évaluations mensuelles apparaissent désormais comme un moyen idéal permettant de déterminer les moyennes exactes obtenues par un élève.
Par conséquent, ces examens finaux ne suscitent ni la peur ni la terreur chez les enfants.
En ce sens que les évaluations mensuelles auront considérablement réduit l’intensité du stress et de la panique, tout en mettant fin à l’atmosphère du sauve-qui-peut qui prévaut dans les foyers.
Sûrement, grâce à ces évaluations mensuelles, les élèves ne seront plus contraints de passer des nuits blanches à préparer la fin d’année, sur fond de soucis hystériques.
Oui, lier la réussite ou l’échec d’un élève aux notes qu’il obtient à l’examen final, comme l’examen d’entrée en 7ème année, est une injustice infligée à cet élève, indépendamment du fait qu’il aurait peut-être passé toute l’année à étudier sérieusement; mais que pour des raisons humaines, psychologiques, physiques ou de force majeure, il aurait raté certaines épreuves, l’amenant à échouer à son examen. Naturellement donc, accoler la réussite et l’échec d’un élève aux notes obtenues à l’issue d’un seul examen est une façon de promouvoir les effets d’un hasardisme aveugle et d’un opportunisme insensé au détriment du sérieux et du travail constant.
Évidemment, obliger un élève à réviser tout ce qu’il a appris pendant une année, afin de déterminer son niveau de compréhension n’est qu’une forme de torture inutile et un tourment abusif au détriment d’une évaluation systématique, constante, logique où l’examen final ne devrait plus être considéré que comme une autre évaluation dans le cadre de l’année scolaire.
Assurément, forcer un élève à réviser tout ce qu’il a étudié une année durant afin de lui octroyer un diplôme ou de lui accorder un certificat n’est qu’une promotion arbitraire de la mémorisation mécanique au détriment de la compréhension et du discernement.
Certes, il n’est un secret pour personne que la mémorisation mécanique a une vie très courte alors que la compréhension et le discernement ont une vie longue, voire restent définitivement.
En tout état de cause, il est temps de se débarrasser de ce système d’évaluation rétrograde et inutile.
Puisqu’il est évident que notre système éducatif dans son ensemble souffre de maux destructeurs depuis des décennies, il apparaît plus qu’urgent de l’inscrire désormais dans la dynamique d’une refondation drastique et totale, afin de sauver ce secteur vital de la nation.
Les observateurs sont unanimes à reconnaître que le système éducatif guinéen est resté très longtemps malade. Au lieu d’avancer, ce système ne fait que régresser au fil du temps. Il n’a pratiquement pas connu les changements qualitatifs souhaités.
Et pour cause, la pléthore d’élèves dans les salles de classe est une réalité palpable et inconcevable dans la mesure où il y a un manquement notoire de salles de classe à travers le pays, évalué à plusieurs milliers.
Les universités publiques manquent cruellement des amphithéâtres requis pour permettre à des centaines d’étudiants de suivre normalement les cours.
Les conditions sanitaires inimaginables dans la plupart des établissements scolaires, à travers notamment le manque notoire de latrines adéquates et propres, ne sont qu’une autre confirmation de la souffrance inacceptable de ce système.
Pourtant, la construction de latrines adéquates devrait être une partie intégrante des actions à entreprendre au niveau de ces établissements scolaires, pour les rendre viables !
Concernant les contenus, ce système éducatif comparé à l’évolution de la science et du savoir dans le monde, laisse à désirer, suscitant ainsi tant de commentaires. Les nouvelles technologies de l’enseignement et de l’apprentissage n’existent particulièrement pas dans nos établissements scolaires.
Évidemment, ce système ignore lamentablement les innovations élémentaires et les réformes essentielles que les systèmes éducatifs connaissent aujourd’hui à travers le monde.
L’un dans l’autre, si notre système sanitaire a besoin d’une refondation drastique pour sauver des vies, force est d’admettre que notre système éducatif a urgemment besoin d’une refondation intégrale, non seulement pour sauver des vies, mais aussi pour sauver toute une nation.
À l’évidence, aucune unité, aucun progrès ni aucune prospérité ne seraient possibles ou imaginables en l’absence d’un système éducatif pertinent, performant et efficace.
En espérant voir incessamment lancée une révolution sans précédent au niveau du système éducatif guinéen, il serait souhaitable de demander humblement aux responsables dudit système d’avoir pitié de nos enfants, particulièrement les plus petits, en les mettant à l’abri, dès la prochaine année scolaire, de la peur, de la terreur et des conséquences des examens finaux.
Chers écoliers et élèves de Guinée, candidats au CEP, au BEPC et Bac, je vous souhaite à tous de bons résultats et pleins succès aux différents examens.
Professeur Koutoubou Moustapha SANO
PhD in Laws