Le dimanche 05 septembre 2021 venait au pouvoir en Guinée le Comité National du Rassemblement et du Développement CNRD suite à une révolution de palais. Ainsi, cette initiative des forces armées guinéennes avait été saluée par plus d’un. Les politiques qui après des mois de séquestration et d’emprisonnement se disaient être enfin libérés de la dictature du régime du professeur Alpha Condé. Ils pensaient ainsi que la Guinée qui avait foulé au sol l’ensemble des valeurs de la démocratie allait se remettre et que les Guinéens pourront s’exprimer librement sur toutes les questions relatives à la vie nationale et choisiront leurs dirigeants sans tenir compte de la religion, de l’ethnie ou encore de la région des différents candidats. Des facteurs qui ont contribué fortement à mettre en péril l’unité nationale.
Les défenseurs des droits humains se montraient optimistes quant au respect des droits et libertés fondamentales pour lesquels ils se battent quotidiennement. Les jeunes qui, après avoir fait des études dans des conditions défavorables et même insouhaitables ont nourri l’espoir qu’avec ces militaires ils allaient enfin se trouver des emplois pour soutenir leurs pauvres parents qui ont tout laissé pour les accompagner dans leurs études. Les fonctionnaires qui se plaignaient et regrettaient même les conditions dans lesquelles ils servaient le pays espéraient une amélioration de leurs conditions de vie et de travail. En un mot, les Guinéens de toutes catégories confondues se sont montrés heureux de voir enfin naître un espoir si grand.
Les hommes des médias espéraient que le bâillonnement de la presse, l’intimidation des journalistes ainsi que les restrictions des médias allaient prendre fin.
Aujourd’hui, (deux ans après), où en sommes-nous par rapport aux promesses qu’avaient tenues les hommes en treillis ? Voilà la principale question que la majorité des Guinéens se posent. Sur le terrain, on constate que des réalisations ont certes été faites par endroit dans le cadre de la mise en place des infrastructures mais malgré cela le retour à l’ordre constitutionnel normal ne serait pas à l’ordre du jour. Les dirigeants actuels sont beaucoup plus préoccupés par la conservation et la consolidation du pouvoir que par les échéances électorales qui pourront sanctionner la transition militaire. Déçus, de nombreux acteurs politiques et de la société civile dénoncent la gestion solitaire du pays par le colonel Mamady Doumbouya et ses hommes, déplorent l’interdiction des manifester dans tout le pays depuis l’arrivée du CNRD au pouvoir, le manque de transparence dans la gestion de la chose publique et réclament même un dialogue politique inclusif impliquant l’ensemble des forces vives du pays.
Les jeunes qui cherchaient l’emploi pour pouvoir se prendre en charge et se mettre à l’abri du besoin attendent toujours l’action du ministère de la fonction publique qui n’aurait que peu où même pas de bilan réel. Car officiellement, aucun recrutement n’a été organisé en leur faveur. Ceux parmi eux qui ont eu le courage d’embrasser la carrière des hommes en uniforme ont participé au concours d’intégration dans l’armée. Malheureusement, après plusieurs mois de formation commune de base dans les différents centres à travers le pays, ils sont nombreux à être remerciés pour des raisons liées à des problèmes d’âge, de santé et de taille justifie-t-on.
Les enseignants contractuels de Guinée qui après avoir servi l’école guinéenne dans les coins les plus éloignés, les plus enclavés, les plus défavorisés du pays ont perdu tout espoir car ils attendent toujours le paiement de leur arriérés de salaire.
Les citoyens qui attendaient l’appui de l’État pour l’accompagnement des paysans, des artisans, des ouvriers afin de booster leurs activités s’impatientent. Les frustrations se multiplient, le chômage s’intensifie, le bardage des ressources s’accélère, la pauvreté s’enracine et le désespoir grandit. Comme pour dire que le Guinéen est loin de se réconcilier avec son État. Et d’ailleurs il est et restera toujours préoccupé par deux choses : la paix et le pain.
Alpha Moussa Dieng, journaliste.