Qu’est devenu Mohamed Salifou Keita, le célèbre Journaliste animateur de l’émission Papier Plume Parole (PPP) sur la RTG pendant plus de trois décennies ?

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Nous sommes le 17 novembre 1984, il a juste vingt-trois (23) ans, le jeune Mohamed crée son émission Papier Plume Parole, ce, à la surprise générale des téléspectateurs guinéens.

A l’époque, la RTG, faisait sa mue. De nouveaux visages émergeaient, de nombreuses émissions étaient au programme de la seule chaine de télévision nationale. Ce qui était étonnant, une émission littéraire à la télévision, dégoupillée par un jeune homme qui rentrait dans tous les salons des guinéens, était une première. Personne ne pariait sur la longévité et la célérité par laquelle l’animateur entretenait ses nombreux invités : des ténors de la littérature guinéenne, africaine d’expression française.

La réputation de Papier Plume Parole, dépasse les frontières Guinéennes, Africaines, Européennes jusqu’au Canada. Le jeune animateur guinéen, intègre le gotha et les cénacles littéraires à travers l’Afrique et l’Europe. Puisque, « nul n’est prophète en son pays », c’est l’Institut Biographique Américain, qui l’octroiera le Prix du Leadership Awards de ABI. Il est le seul africain a figuré dans le majestueux livre de cette septième édition, qu’on retrouve d’ailleurs à la Bibliothèque du Département d’Etat Américain. Le magazine dudit département d’Etat Américain, lui consacrera en 2012, un article élogieux.

L’émission jouit d’une telle audience que trois générations de guinéens sont venues boires à la lie de ce programme, que les guinéens réclament aujourd’hui.

Monsieur Mohamed Salifou, cet expert en Communication Stratégique, Ingénieur en Intelligence Culturelle, qui excelle aujourd’hui dans le Consulting International, est un Écrivain Critique littéraire et poète, il est aussi l’un des plus grands spécialistes de la littérature Guinéenne d’expression Française et un journaliste de renom au talent formidable.  Notre reporter est allé à sa rencontre pour savoir, où et quand Monsieur Mohamed a-t-il commencé ? Comment a-t-il fait ? En tant que Critique Littéraire, Quel est l’état des lieux, de la littérature guinéenne et africaine ?

Toujours avec la même aisance que dans son émission, Monsieur Salifou, décontracté, s’exprime sur tout avec une facilité et une osmose singulière entre parole et gestuelle, c’est un homme courtois, un véritable orateur, qui vous aspire par son élégance et sa connaissance des sujets abordés

 Bonjour Monsieur Salifou, pour commencer, j’aimerais que vous nous reveniez sur votre parcours professionnel jusque-là ?

Bonjour,

J’ai fait le Studio Ecole de la RTG, ce qui m’a permis de faire des formations itinérantes à l’Institut des Hautes Etudes de Journalisme de Berlin Ouest, la ZDF, la deuxième chaîne de télévision allemande etc. Et, puis, j’ai étudié au CFPJ (Centre de Formation, de Perfectionnement des Journalistes) au 31-33, rue du Louvre à Paris où je suis certifié en Multimédia. De même, j’ai fait une spécialisation en Communication l’IPSI (Institut de Presse et des Sciences de l’Information), de L’Université de Tunis I, en Tunisie, non sans avoir fait au premier abord L’INA, l’Institut National d’Audiovisuel Bry Sur Marne, par le biais du SEVOZA, au Zaïre, où j’ai obtenu un diplôme de deuxième niveau de réalisateur de Cinéma, métier que je n’ai jamais pratiqué ici en Guinée. Par contre j’ai réalisé un film de douze minutes, format standard sur celui qui a annoncé le coup d’Etat de Mobutu. Le titre : Lonoh Bokelengue Malangui, l’Ecrivain de l’Histoire. Ce film est dans les archives de l’Ina à Paris.

J’ai terminé tout ce long parcours Scolaire et professionnels par un diplôme de troisième Cycle, Un Diplôme d’Etudes Supérieures Spécialisées (DESS) sur des questions de Stratégies : Politiques Culturelles Internationales, Communication, Coopération Internationale, pour le compte de l’Université d’Avignon et le pays du Vaucluse, à Paris. Parallèlement j’ai ma vocation d’écrivain, D’abord, j’ai écrit le premier livre encyclopédique sur la littérature Guinéenne, Editions Tabala et Book Emissaire Paris 2006. C’est une étude critique de la littérature guinéenne d’expression française. Ce livre est recommandé dans toutes les écoles de la Guinée, par l’Institut National de Recherche et d’Action Pédagogique. Bien entendu, j’attends la mise en œuvre de cela puisque j’ai la copie de la lettre de cette belle intention.   Ensuite, j’ai publié quelques années après mon premier roman « Les enfants du quartier sombre », Editions Tabala et Publibook, c’est un roman qui a connu un grand succès de librairie. Enfin, le 24 novembre prochain, je sors mon recueil de poésie que j’écris depuis 1984. Il a pour titre Nostalgies. Editions Poésie IO, toujours à Paris en France. Mon prochain roman « les Africains du Carla Baye » paraitra au début de l’année 2023, à Paris. L’histoire se passe entre 1943 et 1945. Un jeune officier guinéen basé à Montauban emmène son petit régiment traverser l’Ariège et installe son campement sur la place de l’église fortifiée et sur les bords du lac du Carla-Bayle, pour protéger les habitants du village et les trésors millénaires des Cathares, enfouis dans la « Crouzelle», du Carla le Comte, des Aryens, installés sur la berge du lac. Je me suis attaché à construire une fiction autour du Carla Bayle, de ses figures tutélaires et celles de Coyah-Soumbouyah, habitants l’arrière-pays, en Afrique. De Pierre Bayle, Philosophe Défenseur de la tolérance mutuelle, précurseur de la philosophie des lumières, et de ses valeurs d’être aussi. Il Ya de l’art, de l’humour Exquis, des Drames, des Mythes des Rites et Croyances qui se télescopent dans ce roman de voyage aux relents d’un réalisme patent.  Il met en lumière la marche du monde.  Ses personnages, hauts en couleurs, sont à la fois, acteurs et témoins des vicissitudes de l’histoire qui aboutie à une aube nouvelle.

Carla baye est une commune qui est dans l’Ariège, c’est le village de Pierre Bayle, il est celui qui a ouvert la voie aux philosophes du siècle des lumières. De ce fait, j’ai été très inspiré par ce village qui ressemble un peu à ma ville natale Coyah. Sur le plan administratif, je fus Directeur National Adjoint de la culture. Directeur du livre et de la lecture publique, à ce titre, je suis à la base de la Rédaction de la Politique Nationale du Livre en Guinée. Conseillé Spécial du Premier Ministre. Lobbyiste de l’Etat Guinéen auprès des Médias Internationaux, aussi Lobbyiste pour le Royaume Chérifien.

Cela fait plus de deux ans depuis que vous avez arrêté votre émission à la télévision nationale, après 3 décennies de service, quelle est votre actualité aujourd’hui ?

Je veux me consacrer à l’écriture, j’ai beaucoup de choses à écrire sur mon pays. J’ai des romans à écrire, un qui va sortir et deux livres qui sont presque finis. Si j’ai des ressources, j’ai envie de mettre en place une chaîne de télévision transnationale, parce que quand je regarde les chaînes de télévisions ici, elles ne font que de la musique.

A mon avis, comme je le préconisais dans mes émissions, la radio, la télévision, tout simplement, les médias, doivent faire en sorte que l’accès au savoir soit plus facile en permettant aux communs des mortels d’accéder à la science. Les médias doivent-ils occuper les esprits par la musique seulement, leurs missions sont de faire en sortes que les uns et les aux autres puissent réfléchir, penser, de se poser des questions, la télévision, ne doit point être un instrument d’abrutissement et de divertissement, ce n’est pas un espace où le téléspectateur doit vivre la dictature du divertissement, la télévision, la radio sont des instruments qui sont faits pour que les auditeurs, les téléspectateurs apprennent.

J’ai lancé deux émissions sur Kacback TV que je vais débuter en janvier. La première émission, c’est « La Marche du monde » et puis la seconde est une émission littéraire : « REGARDS », pour continuer à diffuser la nourriture spirituelle.

Justement, je voudrais qu’on revienne sur vos souvenirs en tant que journaliste, les moments forts que vous avez eus à travers ce métier ?

« Je suis heureux, je suis l’instigateur de la renaissance littéraire en Guinée. »

J’ai beaucoup de souvenirs ici et ailleurs. J’ai un souvenir poignant qui m’a marqué, en 1987 j’étais à Brazzaville, les écrivains du monde entier ont fait un symposium littéraire international. A l’époque, le président Sassou Nguesso, était le président en exercice de l’OUA et le vice-président du comité d’organisation, était un Guinéen : Le professeur Charles Pascal Tolno et donc j’ai fait un plateau chez l’ambassadeur Bonnata Dieng et sur ce plateau, vous aviez tous les grands écrivains, tous les grands poètes africains comme Sony Labou, Tansi, Jean Marie Addiaffi. Mais celle qui a retenu mon attention ce jour-là, fut feue Fatou N’Diaye Sow Paix à son âme, c’était une poétesse du Sénégal qui a dit un poème sur les enfants de Soweto, il se trouvait que le guinéen Kaba 41 qui a écrit « Soweto ma douleur » était là aussi. Et alors, quand Fatou a dit son poème, tout le monde a pleuré. Je n’oublierais jamais cette scène. OUI ! De constater que la puissance des mots, et la puissance de la poésie peuvent aspirer l’âme à ce point.  J’ai un autre souvenir également. C’était à Grand Bassam en Côte D’Ivoire, lorsque feu Kaba 41 a eu en 1985 le prix Paterson de la Fondation Felix Houphouët-Boigny et ce jour-là quand on a dit Soweto ma douleur par le feu Abdoulaye Aslofaré, poète et cinéaste malien, toute la salle s’est mise à pleurer, j’étais là avec Kaba 41 et Roger Goto Zomou, les deux sont morts, j’étais le plus jeune à l’époque parmi eux. Nous sommes les trois qui avions fondé l’Association des Ecrivains de Guinée. Dans la même veine J’ai créé en Guinée l’Union de la Presse Francophone, l’UPF. Ce sont des organismes que j’ai mis en place et qui fonctionnent toujours, j’en suis fier ! J’ai trop de souvenirs avec les écrivains tant en Guinée qu’à l’étranger comme le Sénégal. Au Sénégal, j’ai eu des aînés qui m’ont porté à bras le corps comme Aminata Sow Fall, la romancière, je pense également à Makhily Gassama, Amadou Lamine Sall, et mon grand ami Tierno Monenembo, Paul Dakeyo, qui est venu vivre ici à cause de nous, Tierno Monenembo et moi. Le dernier souvenir pour moi, c’est lorsque j’ai eu le prix du leadership Awards de l’institut Biographique américain aux États-Unis Raleigh, en Caroline du Nord.

Je veux vous entendre sur les noms de deux grandes personnalités de ce pays. Le premier est journaliste, Odilon Théa et le second, c’est bien votre ami, l’écrivain Tierno Monenembo ?

 

« Odilon Thea, un homme doux… Tierno, c’est le plus grand écrivain francophone aujourd’hui… »

Odilon Théa, c’est un aîné à nous, un homme doux, qui a une carrière, professionnelle sans anicroches, à la radio. C’est un vrai pro que je respecte beaucoup, et qui a une belle voix radiophonique. Tierno Monenembo c’est un ami, un homme que je respecte beaucoup. C’est le plus grand écrivain francophone aujourd’hui, Tierno, n’a plus besoin de prix. C’est un talent pur, un homme de sa trempe n’embouche pas la même trompette que les autres.  C’est ça Monenembo ! Il écrit des livres fabuleux. Il a écrit une quinzaine de livres, il est respecté dans le monde entier. Je pense qu’il faut le prendre comme tel, ces œuvres sont étudiées partout, elles sont intemporelles on doit en être fier.

Pensez-vous que les écrivains ont leur place aujourd’hui dans notre pays ?

La logique ici est qu’on n’a jamais aimé les intellectuels dans ce pays. J’entends par intellectuel, celui qui est dans les livres qui lit et publie. Un intellectuel est celui qui publie. Certains se font appeler « professeurs », où sont-elles leurs productions scientifiques ? Où sont-elles ces productions ? Vous n’en avez pas beaucoup ici. Si vous regardez le parcours de la Guinée, les intellectuels ont toujours été opprimés. Il faut que nos dirigeants comprennent que les intellectuels sont les objecteurs de la Société les phares et bergers. Regardez le cas de Camara Laye, il est mort en exil, je le révèle dans mon livre littérature guinéenne, le seul regret de Laye, fut d’être éloigné de ceux qui l’ont aimé dont sa maman, Daman.

Quid de la littérature, la couche juvénile s’intéresse – t-elle à la littérature fréquente –t-elle les bibliothèques ?

J’habite en face de l’ Harmattan, chaque fois qu’un livre est publié, Mohamed Lamine Camara, le Directeur éditoriale de cette structure m’en donne, je lis le soir, le matin, je viens donner mon avis. Les jeunes sont pressés d’écrire, moi, j’ai mis quatre ans pour publier mon roman, et mon recueil de poèmes, qui sort ce 24 Novembre, j’ai commencé à l’écrire en 1978, j’étais simple lycéen. Ce sont des amis à l’étranger qui connaissent ce manuscrit ont exhorté à ce qu’il soit publié maintenant. Donc, je conseille aux jeunes gens de travailler la langue d’usage pour nous produire des œuvres comestibles. Aujourd’hui, il y a quand même des noms comme Yamoussa Sidibé qui est un vrai romancier, il y a également Mambi Magasouba qui écrit très bien. C’est un très grand écrivain ce monsieur, je le suis de près ! Les livres publiés par ces deux messieurs sont très comestibles. En poésie, Il y a la grande dame de Labe, Zeinab Koumanthio Diallo.

Votre regard sur la littérature africaine, selon vous, est-elle en train de régresser ou de progresser ?

Aujourd’hui la littérature africaine n’est plus dans un cercle concentrique. Elle a éclaté et elle appartient à la littérature universelle, elle évolue très bien, raison pour laquelle, les auteurs africains sont reconnus. Elle évolue avec des fondamentaux, des textes dont les thèmes sont captivants et participent à la construction à la revivification surtout à la consolidation de la culture de l’Universel.

Entretien réalisé par Diarouga Aziz Baldé pour Planete7.com

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