Deux erreurs stratégiques à éviter en vue de la réussite effective des récentes initiatives présidentielles pour des routes à Conakry.
En tout ce qui concerne l’amélioration des conditions de vie des guinéens par le biais des infrastructures sociales de base, dont les routes en particulier, mon désir de voir la réussite dans ce cadre n’a d’égal que ma volonté de contribuer pour cette atteinte.
À cet effet, les initiatives présidentielles prises récemment en vue de viabiliser 170 km de routes urbaines à Conakry sont hautement salutaires. Cependant, pour que la rentabilité de ces initiatives s’incruste effectivement dans le développement harmonieux et durable de notre capitale, évitons avant tout de commettre les deux erreurs stratégiques suivantes :
☆ 1) Face aux multiples échecs dans l’application du béton bitumineux sur beaucoup de nos routes, la dévolution de plus en plus croissante pour des chaussées en béton armé ne me semble pas judicieuse dans certains quartiers de Conakry, où la couverture en eau potable et plusieurs autres conduites souterraines sont quasi inexistantes ou de faibles niveaux.
Cette façon de faire pourrait conduire à court ou moyen terme à des conflits d’intervention entre le département en charge des routes et ceux de l’électricité, de l’adduction d’eau, des réseaux internet, etc…
En effet, la chaussée en béton armé, malgré son coût relativement cher, possède de grandes qualités de résistance et une quasi absence d’entretien sous trafic. Mais tout tripatouillage éventuel de son corps, au motif de faire passer telles ou telles conduites ou installations, lui est fortement préjudiciable en ce sens qu’elle perdrait ainsi de sa rigidité prévisionnelle indispensable pour son fonctionnement normal.
Toutefois, il est possible de maintenir ce type de chaussée à condition de prévoir des réservations de conduites pour des besoins futurs relevant d’autres services. À défaut, ce seraient des investissements lourds dont il faudrait reprendre avant terme pour satisfaire d’autres nécessités toutes aussi indispensables en vue d’un cadre de vie décent pour les habitants des quartiers concernés. Entendu par-là que le mode circulatoire ne doit pas être la seule dépendance de nos voies publiques. Cette disposition est une particularité importante pour les voiries urbaines.
Au regard de tout ce qui précède, à mon avis, il est plus rationnel de privilégier pour le moment dans nos quartiers le béton bitumineux bien exécuté du type épais comme sur les 2×2 voies Fidel Castro. Entre autres, l’avantage de la chaussée en béton bitumineux réside dans ses propriétés de pouvoir s’adapter à la reconstitution de son corps, après chaque travail de traversée de conduite.
☆2) La deuxième erreur stratégique consiste d’aller vite, vaille que vaille dans les travaux d’exécution de nos routes.
En réalité une fois le temps d’exécution analysé et validé pour chaque volet de travaux à exécuter, le tout compilé dans un paquet global appelé « délai calendaire d’exécution des travaux » dont on résume souvent par l’expression « délai d’exécution » ou « délai prévisionnel d’exécution », est la résultante d’une conclusion d’analyses rationnelles du volume des travaux, des moyens techniques et financiers disponibles, y compris une faible dose d’imprévu. C’est donc sur la base de ce document technique validé que le rythme normal des travaux est défini et suivi. Aller vite au-delà de cette prévision exige de renforcer toutes les capacités d’action et de contrôle pour que l’ouvrage fini n’enregistre aucune anomalie, ni faiblesse. À défaut, ce serait tout l’investissement qui risquerait de prendre un coup dur à court ou moyen terme.
Autant dire que les causes de la précocité de vie de certaines de nos infrastructures routières dépendent aussi de nos erreurs stratégiques.
Balla Moussa Konaté, ingénieur pont et chaussées