Pour sa première apparition à la tribune des Nations Unies, le Colonel Mamadi Doumbouya, Chef de l’Etat, Chef Suprême des Armées Guinéennes, a frappé un grand coup. C’est comme si toute l’Afrique actuelle, en un homme nouveau, affirmait son indépendance et sa dignité à la face du monde.
Il s’est résolument placé aux antipodes des bien-pensants, ces Chefs d’Etat africains conformistes et obséquieux envers ce qu’on appelle la communauté internationale. Une appellation commode pour désigner en réalité les puissances qui entendent dicter leur loi à l’Afrique et lui imposer les modèles politiques propres à assurer et perpétuer leur mainmise sur les immenses richesses naturelles du continent noir.
Le Colonel Mamadi Doumbouya a sonné le glas au paternalisme qui, jusque-là, a pris les Africains pour des serfs taillables et corvéables à merci.
Nos États ne sont plus des terres conquises. Cela doit être compris une bonne fois pour toutes et l’Organisation des Nations Unies, pour rester fidèle aux principes qui ont présidé à sa création, doit vibrer en phase avec le devenir en marche dans la jeunesse et les armées africaines.
Le Chef de l’Etat guinéen a fait le lien entre les prises de responsabilités des militaires, en passe de devenir une véritable déferlante sur le Continent, et l’obsolescence des régimes inféodés et corrompus, en rupture totale avec les aspirations populaires.
S’il reconnaît qu’un putsch n’est pas une fin en soi, il le perçoit cependant comme un moyen de dégager un système politique inadapté au niveau de conscience auquel sont parvenus les peuples africains.
La Démocratie en copier-coller a fait son temps. L’Afrique s’invente. Elle veut forger son destin, trouver son modèle politique selon ses propres valeurs, ses propres coutumes, ses propres réalités. Elle suit sa voie sans être ni pour ni contre une quelconque puissance.
Des mutations sont à l’œuvre, dans la pensée et dans l’action, partout en Afrique et au sein de sa diaspora. Comme une lame de fond, elles sont inexorables. Le Chef de l’État, Chef Suprême des Armées a appelé la communauté internationale au respect et à la retenue envers les choix souverains qui s’opèrent en Afrique de manière inflexible. Ces transformations politiques, sociales et sociétales cadrent d’ailleurs avec le thème de la 78e Session de l’Assemblée Générale Ordinaire des Nations Unies « Paix, prospérité, progrès et durabilité ».
Selon le Colonel Mamadi Doumbouya, une attitude et un comportement s’imposent à la communauté internationale. Plutôt que de dénoncer les putschs réparateurs des torts faits aux peuples d’Afrique par des Chefs d’Etat enfermés dans leur tour d’ivoire avec un faux label démocratique et prenant leurs ordres au Nord, la Communauté Internationale doit avoir « l’honnêteté » et « la correction » de s’interroger sur les causes qui déterminent une armée à renverser un régime en Afrique. Il faut soigner le mal à la racine. La racine, c’est la modification de la Constitution pour se maintenir indéfiniment au pouvoir, c’est le bradage des ressources naturelles et la confiscation de la richesse par l’Administration et quelques agents économiques favorisés. La racine, c’est aussi la prétention d’anciens hauts fonctionnaires à la fortune illicite de prendre les rênes du pays par le moyen de la politique.
Or, ces Chefs d’État et ces politiciens ne sont nullement blâmés par les donneurs de leçon. Bien au contraire, ils sont sous l’aile protectrice de la Communauté Internationale qui trouve en eux les garants actuels ou potentiels de ses intérêts économiques et géostratégiques.
En vérité, le coup de force du 5 septembre 2021 était un changement institutionnel salutaire. Il a sauvé la Guinée d’un régime tyrannique et illégal, mais aussi et surtout a exorcisé le spectre du chaos qui planait au-dessus du pays comme l’épée de Damoclès.
L’insurrection était possible à tout moment, la Guinée était au bord du gouffre. Il fallait que l’armée prenne les choses en main et engage de profondes réformes pour sortir l’Etat de son quasi-délitement et rénover un tissu social en lambeaux.
Les transitions militaires instaurées ces trois dernières années dans certains pays du Continent traduisent l’éveil de l’Afrique et sa volonté d’être le seul maître de son destin. Ce destin exige que l’économique prenne le pas sur le politique. Le potentiel économique que la nature a alloué à l’Afrique, qualifiée par tous les spécialistes de continent du futur, doit enfin commencer à se traduire en bien-être pour tous.
Les pays du Nord doivent se familiariser à l’idée que désormais ils doivent coopérer avec le continent noir d’égal à égal, sans esprit de domination d’un côté et de subordination de l’autre. L’intérêt mutuel, juste et équitable ainsi que le respect de la souveraineté africaine sont désormais des règles d’or.
Le moins qu’on puisse dire, c’est que la session de New York a été l’occasion rêvée pour l’enfant prodige de Kankan-Nabaya de révéler sa stature d’Homme d’Etat et de grande figure africaine.
Le Colonel Mamadi Doumbouya est un héritier des valeurs altières des empires séculaires qui ont éclos en Afrique occidentale et trempé le caractère de ses enfants. Assurément, il a produit un effet considérable et décisif du haut de la tribune des Nations Unies.
Mandian SIDIBÉ
Journaliste