Tensions politiques en Afrique de l’ouest : la diaspora guinéenne entre lueurs, angoisses et inquiétudes

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Il y a quelques mois nous avions alerté sur la fragilité de nos compatriotes dans certains pays de la sous-région. Il est fondamental de remédier cette limite stratégique.

La Guinée n’est certes pas en pays en guerre ni un pays instable, moins encore un pays ingouvernable, malgré l’idée largement véhiculé dans ce sens. Elle connait tout de même, des tensions politiques cycliques. Mais elle demeure un pays qui contrôle la totalité de son territoire. Il n’y a ni guerre de faible intensité ni un affrontement violent. A ce jour, elle fait face encore aux menaces terroristes. Son seul défi, reste et demeure la gestion des crises sociopolitiques, qui d’ailleurs, font l’objet d’un marchandage diplomatique d’une partie de la diplomatie sous-régionale. C’est autour également des tensions politiques en Guinée qu’une certaine expertise se créer de tout part dans le voisinage.

Cependant, elle en a tout l’heure d’être un pays dévasté par la guerre, compte tenu du nombre élevé des guinéens en transites ou qui cherchent à s’établir dans la sous-région, en vue d’une condition de vie meilleure (Benin, Côte-d’Ivoire, Gambie, Guinée – Bissau, Libéria, Mali, Mauritanie, Sénégal, Sierra Léone, etc.)

Les raisons de départ sont multiples. Si le par le passé, cette immigration de masse était liée à la répression politique. Aujourd’hui, les raisons sont toutes autres. Elles sont largement d’ordre économiques (la quête d’une vie meilleure).  Tout de même, les causes liées aux persécutions politiques persistent toujours. On ne peut occulter néanmoins aussi dans cette mobilité, la proximité géographique, les liens sociaux : historiques, culturels et religieux.

Par ailleurs, il ne faut pas appréhender cette diaspora uniquement en termes d’atouts économiques. Il faudra l’analyser sous l’angle géopolitique comme une limite, une menace et éventuellement comme un facteur de tension diplomatique majeur entre nous et nos voisins, nuisible dans ce cas, pour les intérêts de nos compatriotes. En pareille circonstance, la diplomatie guinéenne se retrouve dans une position inconfortable. Elle souffrira d’un « complexe d’infériorité » devant ces voisins. Elle sera obligée par pragmatisme pour reprendre, Docteur Amadou CAMARA, d’opter pour une diplomatie du profil bas, qui limite impérativement sa capacité d’influence pour la protection de ses ressortissants ou pour rivaliser avec ces pays dans des questions stratégiques sous-régionales, continentales et mondiales.

Qu’une crise soit localisée en Guinée ou dans un pays cité en haut, les guinéens vivent dans l’angoisse et dans l’inquiétude. Ils sont victime à la fois de stigmatisation sur la situation de leur pays et soupçonner à tort ou à raison de s’adonner à des activités délictuelles dans les pays d’accueils.

Quelle posture doivent adopter les autorités guinéennes et ses ressortissants face à la tension politique récente dans certains pays voisins ?

L’Etat guinéen doit par principe apporter soutien et protection diplomatique à ses ressortissants, tout en œuvrant à ce que ses nationaux soient conformes aux politiques d’immigration des Etats de destinations. Il reviendra aussi aux citoyens guinéens, d’adopter une posture républicaine, responsable, modèle en toutes circonstances – période normale ou période de crises.

I – A l’encontre des autorités guinéennes

Les autorités diplomatiques et consulaires doivent impérativement avoir une cellule de crise en permanence. Aussi bien, les agents diplomatiques que les ressortissants doivent être sensibilisés sur la communication et sur l’attitude à adopter en période de crises.

Les autorités doivent en période normale mettre en place une politique de sensibilisation pour ses ressortissants en voyage, en transit ou en résidence dans un pays voisin. On peut par exemple confectionner un guide de voyage contenant les devoirs pour un citoyen à l’étranger envers son pays et envers le pays d’accueil. Ce guide peut être confectionné en français qui est la langue officielle et dans les langues nationales du pays. Le document doit notamment être mis à la disposition des services de passeport, aux syndicats de transports et aux niveaux de points de départ pour l’étranger (aéroports, ports, garages, postes frontaliers), au niveau des consulats et ambassades pour le bénéfice du guinéen.  Cette politique de sensibilisation peut être incluse dans les programmes d’éductions civiques et culturelles nationales.

En période de crises, les autorités doivent agir en collaboration avec les associations, les formations politiques, les acteurs culturels pour sensibiliser le citoyen sur la posture à adopter en cas de crise interne du pays d’accueil. Les autorités, au plus haut sommet, doivent mobiliser les moyens humains et financiers pour faciliter cette campagne : publicité, spot, communiqué de presse, message. Deux principes classiques des relations internationales peuvent constituer le centre de cette action. Il s’agit du principe de neutralité et du principe de non-ingérence dans les affaires intérieures des Etats. Les autorités administratives doivent également empêcher tout embarquement ou toute sortie du territoire d’un citoyen sans un titre de voyage valable : Carte nationale d’identité, passeport. Le gouvernement doit impérativement faciliter dans les consulats, l’obtention des documents consulaires, le renouvellement des documents de voyage, en cas d’expiration. Un effort doit être consenti à ce niveau pour permettre aux guinéens de renouveler leur titre de voyage dans le délai en Guinée et dans les représentations diplomatiques afin de prévenir toute mésaventure pour défaut de titre de voyage valide. Également et surtout, dans cette perspective, renforcer l’efficacité des services consulaires, notamment la relation entre les ressortissants et les agents dans les ambassades.

Le citoyen a aussi un rôle à jouer pour la sauvegarde de l’image de notre pays.

II – A l’encontre des citoyens

L’Etat guinéen c’est d’abord et avant tous nous les citoyens. Nous sommes les ambassadeurs premiers de notre pays à l’étranger. La sauvegarde de son honneur et de son image nous incombe donc à tous. Il y’ a quoi être fier de notre pays, quel que soit les difficultés, les contextes et les circonstances. C’est ce pays qui a vu naitre Samory Touré, Alpha Yaya Diallo, C’est dans ce pays où se retrouve une partie de l’empire mandingue et le Fouta théocratique. C’est le pays de Sékou Touré, de Camara Laye, de William Sassine, de Alioune Fantouré, de Thierno Monenembo et de Djbril Tamsir Niane.

C’est notre pays qui n’en déplaise, qui a montré à l’Afrique noire le chemin des indépendances et a été un foyer de lutte pour la libération du continent. Les leviers de souveraineté internationale – armée nationale, monnaie, drapeau et hymne nationale ont été créés deux ans avant l’accession de la plupart des Etats africains à la souveraineté internationale.

La Guinée a siégé aux Nations Unies plusieurs années à côté de la France, de la Chine, de la Russie, des Etats Unis d’Amérique et du Royaume Uni et à côté d’autres puissances étrangères alors qu’une bonne partie des Etats étaient sous la domination coloniale. La première femme à avoir présidé le Conseil de sécurité des Nations Unies est une compatriote.

Diallo Telly a été le premier Secrétaire Général de l’organisation continentale. Notre pays a été le centre du panafricanisme et de la lutte pour l’indépendance en Afrique. Notre armée nationale a repoussé par le passé, les attaques d’une puissance dominante (le Portugal) pour notre engagement pour la libération des Etats africains, encore sous domination. On a réussi à faire face à des attaques rebelles sur trois fronts de notre territoire dans un contexte d’instabilité sous-régionale (guerre au Libéria, en Sierra Léone en Guinée Bissau et en Côte-d’Ivoire) et de crises économiques. Notre pays a été un pays d’accueil pour de nombreux ressortissants de pays de la sous-région en guerre.

Malgré tout ce qu’on dit aujourd’hui sur l’armée guinéenne, les forces de défense et de sécurité ont préservé notre intégrité territoriale.  Notre diplomatie a su faire face à une lutte diplomatique acharnée d’une puissance dominante – membre permanent du Conseil du de sécurité des Nations Unies (la France) contre son accession à l’indépendance et dans ses débuts, en tant que jeune Etat nouvellement indépendant.  Réapproprions-nous de notre passé glorieux, des valeurs et des succès politico-diplomatiques et militaires pour le rayonnement et la construction de notre pays, préservons l’image et la crédibilité de notre pays. Soyons des citoyens model, œuvrons enfin pour la paix, la cohésion sociale en Guinée et ailleurs.

C’est une erreur grave pour un citoyen de s’offusquer de se munir d’une pièce d’identité nationale, de surcroit, pour un citoyen qui envisage de voyager à l’étranger. C’est une grande naïveté également d’envisager de sortir du pays sans un titre de voyage, quelque soit l’hospitalité du pays d’accueil et le niveau de développement de l’intégration régionale (libre circulation des personnes et des biens). De même, pour ce qui est de l’acquisition des documents consulaires qui sont primordiales à l’étranger.

II ne faut pas attendre le déclenchement d’une crise et l’avènement d’une tension diplomatique pour se bousculer devant les ambassades en vue d’obtenir une carte consulaire qui est primordiale pour tant des domaines et d’activités. Il faut à tout prix remplir les conditions de séjour imposé par le pays d’accueil en toutes périodes.  C’est un acte civique et patriotique.

En période de tensions, il faut redoubler de vigilance et de prudence, éviter les zones à risque, s’abstenir surtout de participer dans les processus politiques des pays de résidence. Pendant ces moments, si ce n’est pour un cas d’urgence, réduire la mobilité, en évitant surtout les lieux de manifestations (autorisées ou non autorisées), s’abstenir de faire de commentaire, de partager des images de violence, des appels à la violence.

Aux leadeurs d’opinions : politiques, analystes, universitaires, artistes, journalistes, blogueurs ou leadeurs associatif, ou simple citoyen, il nous faut de la retenue, évitons de prendre positions sans une maitrise réelle des causes et conséquences de ces événements politico – juridiques. Ces questions sont critiques et si elles ne sont pas traitées avec lucidité peuvent nuire aux intérêts de nos compatriotes. Chaque pays à ses réalités, sa trajectoire historique et politique.

Vive la paix !!!

Vive l’intégration africaine !!!

Vive le panafricanisme et l’unité africaine !!!

Amadou Lamaramane BAH, diplômé en Relations Internationales

Doctorant en Droit Public : FSJP/UCAD

Email : amadoulemaire@yahoo.fr.

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