Le programme SIMANDOU 2040 : la Guinée est-elle réellement prête pour un tel projet ? (Par Mamadou Hawa Diallo)
Lancer des projets ambitieux est une étape importante pour le développement d’un pays. À ce titre, le projet Simandou m’a enthousiasmé. J’ai pris plaisir à lire ce matin des articles détaillant cette initiative et à imaginer les transformations qu’elle pourrait apporter à la Guinée. Même si sur le site internet du projet, il n’y a que la page d’accueil qui est fonctionnelle. Cependant, une question essentielle me vient à l’esprit : la Guinée est-elle réellement prête pour un tel projet ?
Pour un pays comme la Guinée, en transition économique et institutionnelle, le modèle de développement le plus adapté est sans doute un modèle progressif qui privilégie une croissance graduelle, durable et inclusive, afin de construire des bases solides avant de se lancer dans des projets d’envergure. Un pays en transition est souvent marqué par des faiblesses structurelles : des institutions fragiles, une économie qui dépend fortement d’un ou deux secteurs, ce qui expose le pays aux chocs économiques externes et d’instabilité politique et sociale, où des tensions internes peuvent rapidement perturber les projets.
On a des exemples dans certains pays africains comme le Congo où l’exploitation prématurée du cuivre et du cobalt dans un environnement institutionnel instable a conduit à des fuites massives de capitaux et à une faible contribution au développement local. Au Nigeria, l’exploitation pétrolière massive a enrichi une élite corrompue, tandis que les régions productrices ont souffert de la pauvreté et de la pollution environnementale.
Les grands projets miniers comme Simandou engendrent des flux financiers importants. Toutefois, ces entrées massives de devises peuvent avoir des effets pervers : appréciation de la monnaie locale réduisant la compétitivité des autres secteurs, notamment agricoles et industriels, surendettement etc.
Tout cela peut avoir des conséquences à long terme : Une dépendance précoce à un projet comme Simandou pourrait réduire les incitations à diversifier l’économie guinéenne. Cela expose le pays à des cycles de boom et de récession liés aux fluctuations des prix des matières premières, sans oublier la dégradation de l’environnement et des conditions sociales.
L’approche optimale consiste à investir d’abord dans les fondations économiques, institutionnelles et sociales, afin de maximiser les bénéfices des projets futurs et de garantir leur durabilité. Cela revient à éviter de mettre la charrue avant les bœufs pour permettre au développement de suivre un cheminement logique et stable.
Un projet comme Simandou peut placer le pays très haut avec un modèle de développement adapté à nos réalités.
Mamadou Hawa Diallo
Consultante data scientist
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