La monnaie guinéenne s’est appréciée vis-à-vis des devises (dollar et euro), mais les prix des biens et services augmentent. Qu’est-ce qui explique ce phénomène ? 

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J’apporte ma modeste analyse en ma qualité de financier pour répondre à des nombreux gens qui me posent cette question.

Généralement, lorsque la monnaie locale d’un pays s’apprécie, les prix des biens et services dans ce pays baissent, mais il est important de préciser que cette baisse des prix dépend des raisons pour lesquelles la monnaie concernée s’est appréciée. En d’autres termes, la monnaie peut bel et bien s’apprécier par rapport aux devises étrangères et que les prix au lieu de baisser restent inchangés ou varient d’ailleurs à la hausse. Nous pouvons donc en déduire que la baisse du niveau général des prix est de plus liée aux RAISONS d’appréciation d’une monnaie que l’appréciation elle-même.

Pour dire claire, lorsque le dollar s’apprécie le prix des biens et services baissent aux États-Unis, mais une appréciation du franc Guinéen ne signifie pas obligatoirement une baisse du niveau général des prix en Guinée.

Pourquoi cette différence ? Qu’est-ce qui peut expliquer que la monnaie guinéenne s’apprécie et que les prix augmentent ? La réponse à ces questions fera l’objet de cette présente analyse. Simplement, cette situation intervient, c’est si et seulement si nous n’importons pas une proportion importante de ce que nous consommons.

En effet, en Guinée, même si j’attends assez d’économistes spéculer, c’est bel et bien vérifiable donc explicable économiquement que notre monnaie s’apprécie (augmentation de sa valeur commerciale) et que les prix restent en situation de range (constants) ou varient à la hausse.

Tout d’abord, comparativement aux USA, nous avons une économie plus dépendante que les siennes donc une propension marginale à importer plus grande que les leurs. 

D’abord, tachons de savoir pourquoi la monnaie guinéenne s’est-elle appréciée ?

En ce qui concerne les raisons d’appréciation de notre monnaie locale, nous pouvons citer :

1 – le changement de régime :

Les biens que nous consommons depuis janvier ont généralement été importés aux mois de septembre, octobre, novembre or en ces moments, nous venions à peine d’assister au sursaut patriotique des militaires (coup d’Etat). Les opérateurs économiques, n’étant pas si rassurés à l’époque, ont décidé de moins investir donc d’importer moins. Or, si on importe peu, ce que notre demande en devise étrangère baisse donc la monnaie nationale (locale) s’apprécie.

2 – la faible demande des devises étrangères :

Un second facteur qui explique l’appréciation du franc guinéen est la faible demande des principales devises étrangères (dollar, Euro…) sur le marché parallèle (cambistes noirs), et ce, grâce non seulement à la politique d’austérité budgétaire de la junte militaire, mais aussi et surtout à l’arrêt de la grande demande de change (conversion d’une monnaie en une autre) des fonds volés, détournés par nos gouvernants.

3 – la baisse du budget de fonctionnement de l’Etat :

Après ces deux premières raisons, s’ajoute la baisse du budget de fonctionnement de l’Etat surtout la rubrique charge courante et plus précisément la ligne achat de matériels de bureau. La baisse de l’achat de ces matériels de bureau qui passait obligatoirement par les importations a entraîné une baisse de la demande de la monnaie étrangère donc l’appréciation de notre monnaie locale.

Ce sont en quelques sortes les raisons pour lesquelles la monnaie guinéenne s’est appréciée.

Alors, pourquoi malgré cette appréciation de notre monnaie, le prix des biens et services restent inchangés ou varient à la hausse ?

La raison est économiquement très simple. Manifestement, on est d’accord que la quasi-totalité de ce que nous consommons en Guinée est importé, or l’une des raisons de l’appréciation de notre monnaie est la baisse de cet apport émanant de l’extérieur. Si l’importation baisse pendant que nous produisons moins, notre marché intérieur se réduit ; et dans ce cas de figure, la demande intérieure devient supérieure à l’offre intérieure, ce qui entraîne une augmentation du niveau général du prix des biens mais pas à la même proportion que les services.

Comme nous pouvons le constater, la cherté de la vie concerne aujourd’hui plus les biens que les services. Pour dire différemment, les frais de transport et de communication, le coût des transactions bancaires et les soins médicaux…sont et demeurent presque en situation de range (inchangés) ou varient à la hausse à une proportion faible par rapport à celui des biens.

Puisqu’en réalité, ce sont les biens qui ont de plus augmenté de prix, je trouve que nous sommes plus dans une SHRINKFLATION qu’une INFLATION. Cette notion de shrinkflation est peu utilisée par les analystes guinéens et pourtant son existence ne souffre d’aucune ambiguïté.

L’inflation, la déflation, la désinflation, l’hyperinflation, la stagflation, la shrinkflation, la skimpflation sont tous des indices macro-économiques, mais qui ne peuvent signifier la même chose. Leurs explications feront l’objet d’une nouvelle analyse.

Par Hamid Camara, financier.

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