Alpha Condé : « Au cours de cette année qui vient de s’écouler, la junte nous a privé des libertés les plus élémentaires »

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Guinéennes et Guinéens,

Mes très chers compatriotes,

En cette période de réflexion et de célébration, je tiens à vous adresser mes vœux les plus chaleureux pour la nouvelle année.

Mes pensées vont à chacun d’entre vous, témoignant de notre solidarité agissante dans les moments de douleur et de reconstruction engagée. Nous avons traversé des épreuves pénibles depuis le coup d’Etat du 5 septembre 2021, mais notre résilience et notre unité demeurent des phares d’espoir dans l’obscurité.

En ces temps difficiles, mes pensées et mes prières vont aussi à tous nos précieux collaborateurs injustement emprisonnés. Puissent leur force intérieure et leur foi inébranlable en l’avenir les soutenir, sachant que nous les portons tous dans nos cœurs et nos prières jusqu’à leur libération et leur réhabilitation.

Lorsque nous regardons en arrière, nous nous rappelons les défis que nous avons affrontés ensemble. En effet, cette année 2023 qui s’achève a été marquée par des moments de peine de toutes sortes, mais également par des instants de courage et de solidarité qui ont illuminé notre chemin.

Oui, nous avons vu des membres de notre communauté faire preuve d’une résilience extraordinaire face à des situations difficiles, particulièrement les plus vulnérables. Chacun d’entre vous a démontré une détermination inébranlable à surmonter les obstacles et à reconstruire notre nation.

Mes chers compatriotes,

Ces deux dernières années ont été très éprouvantes pour notre pays, pour nos filles et fils, pour nos agriculteurs, nos enseignants, les contractuels de nos administration publiques et privées, nos paysans, nos planteurs, pour nos journalistes, pour nos opérateurs économiques, pour nos médias, pour nos jeunes dynamiques à la quête d’un premier emploi, pour nos braves femmes qui vivent à la sueur de leur labeur en se levant tôt le matin pour se coucher tard la nuit dans l’espoir de pouvoir nourrir leurs familles et de vivre dans la dignité.

Oui, chers compatriotes, nous avons vécu deux années insupportables. Cette dernière qui s’achève a été encore plus dure. La confiscation de nos libertés débutée le 5 septembre 2021 a atteint son paroxysme en 2023. Au cours de cette année qui vient de s’écouler, la junte nous a privé des libertés les plus élémentaires: celles d’exprimer nos opinions, de nous rassembler, d’échanger sans violation du secret de notre vie privée, celles de nous déplacer, de vivre sans avoir peur d’une arrestation arbitraire, d’un jugement orienté et d’un emprisonnement sans fin. Nous n’oublierons jamais ceux qui ont été tués sans autre forme de procès, ceux qui ont perdus leurs biens les plus précieux avec la montée du grand banditisme ou les familles dont les femmes et petites filles se sont faites violées.

De surcroît, certains des acquis essentiels depuis mon arrivée à la magistrature suprême en 2010 ont été dilapidés par une équipe de prédateurs qui ne représente ni l’armée nationale ni le peuple souverain de Guinée. De valeureux soldats et sous-officiers, Officiers Généraux et Officiers supérieurs républicains promus en notre temps pour leurs mérites et par suite d’une profonde réforme du secteur de la sécurité ont subi des radiations, affectations arbitraires, ou ont été remerciés sans ménagements et poussés d’office à la retraite quand ils n’ont pas été victimes d’assassinats ciblés.

Cette équipe qui a détourné le pouvoir est incapable de satisfaire les besoins les plus ordinaires de notre communauté : incapable d’assurer la desserte en eau et en électricité; incapable de fournir du carburant aux usagers pour permettre le libre mouvement des populations et supporter les activités économiques; incapable de faire fonctionner l’hôpital Donka que nous avons réhabilité avec des équipements de dernière génération dans le but de réduire les lacunes en matière de soins de santé et d’améliorer la qualité des services médicaux pour tous ceux qui en ont besoin. Bientôt, très bientôt, cette équipe ne pourra plus payer les salaires des fonctionnaires et faire face aux dépenses exorbitantes et sur-facturées dans les travaux publics.

En effet, le ton vient d’être donné par le Premier Ministre et le ministre des Finances de ce gouvernement illégitime aux ordres de la junte putschiste qui viennent de nous annoncer pour la première fois depuis l’Independence, des lendemains difficiles et leur incapacité à subvenir aux besoins des Guinéens, et assurer le développement économique et social du pays. Même pendant la période Ebola et de la pandémie de la Covid-19, le gouvernement d’alors avait réussi à juguler la crise et à subvenir aux besoins des populations et à les protéger.

Je vous encourage donc à désavouer ce ton défaitiste, qui n’est pas guinéen, à maintenir votre espoir, votre détermination et votre engagement envers notre communauté. En travaillant ensemble, nous pouvons atteindre des sommets que nous n’aurions jamais crus possibles.

L’année à venir sera une nouvelle page à écrire, une chance de redoubler d’efforts pour un avenir où chacun a sa place, où chacun a l’opportunité de réaliser ses rêves et de contribuer à la grandeur de notre nation.

Mes chers compatriotes,

Dans la nuit du 17 au 18 décembre dernier, de très nombreux résidents de la commune de Kaloum, ont été durement frappés par l’explosion du principal dépôt de carburant, qui a provoqué d’énormes dégâts matériels et de nombreuses victimes.

Je voudrais m’incliner avec respect et compassion devant la mémoire des victimes de ce drame, et je réitère mes condoléances les plus attristées à leurs familles, ainsi qu’à l’ensemble des Guinéens.

A ce stade de mon propos, je dois vous avouer que je regrette profondément cette tragédie, qui n’aurait jamais dû avoir lieu dans notre pays, puisque, sous ma présidence, un projet de délocalisation du dépôt de Kaloum était à l’étude. En effet, le risque d’explosion avait été identifié lors de l’étude d’impact environnementale pour la concession et l’extension du port de Conakry.

À la suite de la visite exploratoire des experts commis à cette tâche, le site de Morybayah dans la préfecture de Forécariah avait été choisi pour abriter le nouveau dépôt pétrolier.

Malheureusement, le 5 septembre 2021, l’ancien légionnaire français et sa bande se sont emparés du pouvoir en enjambant les cadavres de nos compatriotes. N’eut-été ce putsch sanglant, la délocalisation du dépôt de carburant de Kaloum aurait déjà été effectuée, il n’y aurait pas eu ce drame, et on aurait épargné la vie de nombreux guinéens car les travaux devaient commencer fin 2021.

Cet incident tragique a profondément meurtri notre nation. Nous attendons toujours les résultats des enquêtes pour identifier les causes et mettre en place des solutions idoines pour que cela ne se répète plus.

Ensemble, nous allons relever le défi de la reconstruction. Notre détermination à reconstruire, à guérir nos maux, soigner nos plaies et à avancer vers un avenir meilleur est un témoignage de notre force collective. Malgré les défis auxquels nous avons fait face, je suis fier de notre unité et de notre solidarité, particulièrement lors des moments difficiles tels que l’incident tragique de l’incendie à Kaloum. Nos actions de secours et notre soutien ont montré notre capacité à nous mobiliser et à nous unir dans l’adversité.

En cette période de réflexion et de renouveau, je vous appelle à maintenir notre unité, à cultiver la solidarité et à soutenir ceux qui en ont le plus besoin.

Que cette nouvelle année soit empreinte de paix, de prospérité et de solidarité pour tous. Je suis fier de chacun de vous et j’ai hâte de voir ce que nous accomplirons ensemble

Mes chers compatriotes,

Ma reconnaissance et ma gratitude vont aux forces vives et à tous les acteurs politiques et sociaux qui luttent pour libérer la Guinée d’une junte violente, haineuse et prédatrice, aussi indigne que vous êtes dignes.

Vous avez compris qu’elle est dans la dynamique de confiscation du pouvoir. Comme dans celui de 2023, le projet de budget de 2024 ne prévoit aucun financement pour acter son départ. C’est un message clair : « Nous y sommes, nous restons ».

Peuple de Guinée,

Depuis le vote historique de 1958 qui a fait de notre peuple le précurseur pour la reconquête de la souveraineté en Afrique, nous avons vécu ensemble une histoire faite d’espoirs et de désillusions, mais aussi de progrès. Nous avons toujours su dire non pour préserver nos libertés et notre indépendance.

La richesse de la Guinée est son peuple dont la force en fait une grande nation.

En dépit de la répression féroce et impitoyable exercées sur vous, vous êtes restés debout, refusant la soumission et la compromission avec des trafiquants qui ont saboté la Guinée, la faisant glisser de façon inquiétante vers le statut infamant de Narco État.

En ma qualité de Président légitimement investi du suffrage des Guinéens, mon cœur est lourd et mes pensées tournées vers vous pour mettre fin à nos souffrances et sécher nos larmes.

Mes chers compatriotes,

L’année 2024 sera une année de défis pour que nous retrouvions notre droit et notre honneur. J’en appelle à toutes les forces vives de la Nation, au peuple souverain de Guinée, aux forces de défense et de sécurité pour que 2024 soit celle de la fin de notre cauchemar, celle de notre libération.

Je vous exhorte tous à plus de solidarité, à plus d’humanité, à vous aimer comme je vous aime, à aimer la Guinée et les Guinéens.

Je vous souhaite à tous une nouvelle année empreinte de paix, de progrès et de solidarité. Je vous souhaite une bonne et heureuse année dans la liberté et la démocratie.

Ensemble, nous sommes plus forts.

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